Il ne l’est plus ! Les veines saphènes ne sont pas les seuls tuyaux disponibles pour un pontage, des alternatives techniques existent et une veine variqueuse, de toute façon, n’est pas un greffon de très grande qualité. La pratique par ailleurs démontre que la pénurie en la matière reste exceptionnelle. Elle est quasiment nulle pour les pontages des artères du cœur (les coronaires) qui font appel davantage aujourd’hui à des petites artères situées en arrière du sternum : les artères mammaires ou à des artères du bras qu’on prélève (radiale par exemple). Celles-ci sont des greffons de qualité très supérieure aux saphènes (90% de perméabilité à 10 ans contre 50% aux veines). Un segment veineux supplémentaire est parfois nécessaire. A cet égard, la préservation d’un segment saphène jambier sur l’ensemble des deux membres inférieurs suffisait il y a 40 ans pour assurer l’avenir d’un cardiaque qui était à la fois variqueux des deux côtés, (susceptible donc d’être opéré de façon bilatérale) et en même temps « athéroscléreux », (susceptibles de devoir bénéficier un jour d’un pontage artériel quelconque) une situation dont l’incidence est faible, inférieure à 3% !
Cette précaution est devenue inutile : plus de 75% des patients coronariens devant bénéficier d’une revascularisation, sont aujourd’hui traités par radiologie interventionnelle, qui sans chirurgie, par voie endovasculaire permet de dilater, à l’aide d’un ballonet gonflable, les artères rétrécies et de poser des stents (petits ressorts métalliques qui les maintiennent ouvertes), une technique appelée angioplastie. De nos jours seuls les cas complexes justifiant plusieurs pontages sont confiés aux chirurgiens.
Quant à l’incidence des sujets devant bénéficier spécifiquement d’un pontage artériel de jambe, elle ne représente en consultation de phlébologie traditionnelle qu’un cas sur dix mille ! Toutes les autres artères que nous ne citerons pas ici et qui sont potentiellement l’objet de pontages, reçoivent plus volontiers des prothèses (en dacron, en téflon) que des veines. En outre les artères de jambes comme les artères iliaques dans le pelvis sont à notre époque le plus souvent recanalisées par angioplastie comme on le fait pour les artères coronaires. Pour d’autres mêmes, comme la carotide, on enlève l’obstacle in situ, par chirurgie, sans avoir besoin de le ponter. C’est dire à quel point la pénurie en greffon veineux qui fut autrefois une préoccupation, n’est plus du tout un sujet !
Corollaire : Si l’évolutivité et le besoin en greffons veineux ne sont pas des arguments défendables, faut-il être alors contre les stratégies conservatrices ? Certainement pas ! Mais il convient de les utiliser de façon adaptée, à l’appui de vrais arguments et non de raisons fallacieuses. Les formes peu avancées de la maladie, notamment celles où les sujets sont des femmes jeunes, en âge de procréer, ou des sportifs assidus, restent de bonnes indications.